Le spectacle Grand jeu à bord de l’impossible est composé de :

  • Une adaptation – respectant la chronologie et la forme du récit – du roman inachevé Le Mont Analogue (écrit entre 1939 et 1944)
  • Un texte écrit par Philippe DELAIGUE
  • Des extraits de la post-face écrite par Véra DAUMAL dans l’édition de 1952 chez Gallimard
  • Des notes de travail autour du Mont Analogue écrites par rené DAUMAL entre 1938 et 1941-1942

Ce spectacle entend témoigner du parcours singulier et souvent douloureux, parce que hautement exigeant, de René DAUMAL

 

Fil conducteur du spectacle

grand-jeu-a-bord-de-l-impossible1Un personnage raconte aux spectateurs convoqués par lui comment un scientifique inspiré (le père SOGOL) et un écrivain (qui pourrait être DAUMAL lui-même) entraînent un groupe de huit personnes à la recherche du Mont Analogue, « cette montagne qui est la voie unissant le ciel et la terre : voie qui doit matériellement exister, sans quoi notre situation serait sans espoir »… « Il faut que son sommet soit inaccessible, mais sa base accessible aux êtres humains tels que la nature les a faits. Elle doit être unique et elle doit exister géographiquement. La porte de l’invisible doit être visible. »

Il est bon par ailleurs de noter que, entre autres activités, le père Sogol donne des cours d’alpinisme en utilisant la façade de son immeuble comme paroi d’expérimentation !

Tous embarquent sur le bateau L’Impossible à la recherche de l’île sur laquelle doit se trouver le Mont Analogue. René DAUMAL n’a pu terminer le récit de cette impossible et si nécessaire ascension ; la tuberculose l’emporta à l’âge de 36 ans, le 21 mai 1944. Comment parler de cet inachèvement, comment le traduire sur le plan théâtral ? L’acteur qui s’était fait le porte-parole de cette quête se retrouve seul, ne pouvant plus que délivrer d’ultimes paroles du poète sur les traces.

Le spectacle Grand jeu à bord de l’impossible est un récit à une voix. L’interprète est à la fois le conteur, un double de l’auteur et l’incarnation de tous les personnages qu’il côtoie…

À l’intérieur du récit qu’il délivre, il fait exister les autres protagonistes, il prend la parole à leur place, il emmène les spectateurs dans son fabuleux voyage et ceux-ci le suivent, jusqu’au bout…

Dans la première partie du récit, la description des explorateurs est drôle, cocasse et vivante. C’est une petite communauté avec ses travers, ses faiblesses et son désir de connaissance que René DAUMAL nous fait rencontrer ; ils sont comme des reflets de nous-mêmes et c’est un peu nous qui partons à l’ascension de la montagne mythique, métaphore de la montagne intérieure que chaque jour nous devons gravir afin d’être au plus près de nous-mêmes.

Je poursuivis mon chemin, montai quatre étages d’un escalier de service et trouvai ces indications placardées près d’une fenêtre :

« Pierre SOGOL, professeur d’alpinisme ; leçons les jeudi et dimanche de 7 h à 11 h. Moyen d’accès : sortir par la fenêtre, prendre une vire à gauche, escalader une cheminée, se rétablir sur une corniche, monter une pente de schistes désagrégés, suivre l’arête du nord au sud en contournant plusieurs gendarmes et entrer par la lucarne du versant est. »

Le Mont Analogue – Chapitre premier –

« J’inventai… des appareils ahurissants : un stylo qui bavait ou éclaboussait toutes les cinq ou dix minutes, à l’usage des écrivains qui ont la plume trop facile ; un minuscule phonographe portatif, muni d’un appareil pour sourds, à conduction osseuse, qui, aux moments les plus imprévus, vous criait par exemple : « Pour qui te prends-tu ? » ; un coussin pneumatique, que j’appelais « le mol oreiller du doute » ; et qui se dégonflait à l’improviste sous la tête du dormeur ; un miroir, dont la courbure était étudiée de telle façon – cela m’en avait donné du mal ! – que tout visage s’y reflétait en tête de porc ; et bien d’autres. »

Récit du Père Sogol dans « Le Mont Analogue ».

Paroles de René Daumal

« La seule délivrance est de se donner soi-même tout entier dans chaque action, au lieu de faire semblant de consentir à être homme. »

« Je ne veux rien savoir que je n’aie payé pour savoir. »

« Dans toute circonstance, toute situation, il y a une parole à dire, un geste à faire : sans plus d’effort que tout autre, mais cette parole seule, ce geste seul – cette grâce que possède le poète, le prophète. Si l’on veut atteindre l’âme en conservant les corps, il faut faire de ces corps des œuvres d’art – je ne veux pas dire par beauté corporelle, mais par ce geste ou ce mot qui est justement et absolument le seul à sa place… »

Correspondance I (1915-1928) – Lettre à Maurice HENRY du 8 juin 1926 –

« Ce n’est pas le cœur qui est trop jeune, c’est la tête qui est trop vieille.

Si nous étions tous du même âge, dans mon bateau, si nous étions tous des sauvages, dans ma carcasse, les beaux miracles que je ferais !

Il ne faut pas croire qu’ils aient raison, les hommes d’ici, parce qu’ils sont si nombreux. Il ne faut pas se mettre à leur niveau. Il ne faut pas croire qu’on a tort parce qu’on est seul. Au contraire la pensée qui flambe dans la solitude, dans l’indéniable solitude, elle prouve son être. Je n’aurai jamais le cœur résigné des séniles salauds. Et je préférerais casser ma tête si de jour en jour elle ne retournait à l’enfance. »

Correspondance II (1929-1932) – Lettre à André ROLLAND DE RENÉVILLE, octobre 1932 –

 

La montagne, lieu symbolique, reflet analogique du désir de connaissance, d’exigence et d’absolu de l’homme.

René DAUMAL est véritablement un alpiniste de la pensée ; il n’est jamais satisfait, il ne se laisse jamais leurrer par ce qu’il appelle ses fantômes : paresse de la pensée et du corps, tendance à se réfugier derrière de rassurantes théories et de conventionnelles émotions. Son itinéraire est douloureux, car il ne fait jamais de concessions et ne se ménage point, consumant ses forces vitales au service de sa recherche.

Il avance et il doute, sans cependant perdre de vue la montagne dont le sommet est « inaccessible, mais la base accessible aux êtres humains tels que la nature les a faits. » Cette montagne qui doit être « unique » et qui doit « exister géographiquement ».

René DAUMAL a été emporté par la tuberculose, le 21 mai 1944 et son récit restera à jamais inachevé.

« Le chemin des plus hauts désirs passe souvent par l’indésirable. »

René DAUMAL- Le Mont Analogue –

Souvent, aux moments difficiles, tu te surprendras à parler à la montagne, tantôt promettant, tantôt menaçant ; et il te semblera que la montagne répond, si tu lui as parlé comme il fallait, en s’adoucissant, en se soumettant. Ne te méprise pas pour cela, n’aie pas honte de te conduire comme ces hommes que nos savants appellent des primitifs et animistes, sache seulement, lorsque tu te rappelles ensuite ces moments-là, que ton dialogue avec la nature n’était que l’image, hors de toi, d’un dialogue qui se faisait au-dedans.

René DAUMAL – Textes annexes au Mont Analogue écrits entre 1938 et 1941-42 –

Un roman philosophique

Chez René DAUMAL, le sens de l’absolu se démarque de l’idéalisme pur de Friedrich HEGEL (1770-1831) pour être plus proche de l’absolu de Baruch SPINOZA (1632-1677) ou de Giordano BRUNO (1548-1600), c’est-à-dire « l’Absolu qui est Un ou l’identité et la réalisation de tous les possibles. À la fois au-delà de toutes formes et de toutes essences, l’Absolu est aussi toutes formes et toutes essences. »

Daumal fait partie de ces quelques rares penseurs artistes qui cherchent à renverser nos valeurs et nos certitudes, qui fissurent le mur du savoir confortable pour ouvrir leurs yeux (et les nôtres) sur une réalité hors des mots, sur un espace oxygéné de haute-montagne, « de ces hommes parfaitement et consciemment désespérés qui ont reçu le mot d’ordre « Révélation-Révolution », des hommes qui n’acceptent pas, dressés contre tout. »

Jean-Louis ACCARIAS – « La voie négative », in Les Dossiers H, Éditions L’Âge d’Homme, 1993

« La Joie est le passage de l’homme d’une moindre à une plus grande perfection. »

Baruch SPINOZA – L’Éthique (1661-1675), Troisième partie, Définitions des sentiments, Scolie II, Traduction de A. GUÉRINOT, Éditions IVREA, 1994.

Un récit tragi-comique

Il y a dans l’écriture de René DAUMAL un vrai sens du rythme, du suspense, à travers une prose active, dense, nerveuse et allant toujours vers le haut de la pensée et de la Joie. Mais elle est tragique dans la mesure où le destin de l’homme semble déjà tracé à sa naissance, tant les événements successifs de sa vie trahissent leur prédestination… Quant au comique, il est à la fois de situation et de comportement. René DAUMAL excelle, surtout dans la première partie du roman, à décrire une galerie de personnages à la fois complexes et très typés. L’arrivée des invités du Père Sogol, candidats à la future aventureuse expédition, donne prétexte à l’auteur de croquer des personnages savoureux et attachants, au moyens de notations précises et cruelles sur leurs travers physiques et leurs petites obsessions comportementales.

René DAUMAL s’avère être non seulement un peintre des âmes mais également un chroniqueur scrupuleux et inspiré.

BIBLIOGRAPHIE

1936 : Le Contre-Ciel, Cahiers Jacques Doucet. Réédité chez Gallimard avec Poésie noire, poésie blanche et La guerre sainte.

1938 : La Grande Beuverie.

1952 : Le Mont Analogue, récit véridique, préface par Roland de RENÉVILLE, postface de Véra DAUMAL.

1970 : Tu t’es toujours trompé, Mercure de France, Paris.

1970 : Bharata, l’origine du théâtre. La Poésie et la Musique en Inde, réédité en 2009.

1972 : Essais et Notes, tome 1 : L’Évidence absurde.

1972 : Essais et Notes, tome 2 : Les Pouvoirs de la Parole.

1978 : Mugle, Fata Morgana, Montpellier.

1981 : René Daumal ou le retour à soi, L’Originel, Paris. Contient La Soie.

1985 : La Langue sanskrite, Ganésha.

1996 : Fragments inédits (1932-33). Première étape vers la Grande beuverie, Éditions Éoliennes.

1992 : Correspondance, tome 1 : 1915-1928.

1993 : Correspondance, tome 2 : 1929-1932.

1996 : Correspondance, tome 3 : 1933-1944.

1994 : Je ne parle jamais pour ne rien dire. Lettres à Artür Harfaux, Le contre-ciel/Éditions Le Nyctalope.

2004 : Chroniques cinématographiques (1934) : (Aujourd’hui), Éditions Au signe de la licorne.

2008 : Correspondance avec les Cahiers du Sud, Éditions Au Signe de la Licorne.

Note : La publication des œuvres complètes de René Daumal est encore en cours : on attend un volume qui s’intitulera Se dégager du scorpion imposé et qui réunira tous les textes inédits de l’auteur, de 1924 à 1928. Un volume intitulé Bharata 2 est à l’étude.

Éditions par le Collège de Pataphysique

Le Catéchisme, collection Haha, 1953

Le Traité des patagrammes, Cahier n°15, 1954

Le petit théâtre, collection Haha, 1957

Le lyon rouge, collection Haha, 1963

Éditions obsolètes

1953 : Chaque fois que l’aube paraît, Essais et notes, I.

1954 : Poésie noire, poésie blanche, Poèmes.

1958 : Lettres à ses amis, tome I.

Cahiers René Daumal

Cahier René Daumal n°1 (1987), n°2 (1988), n°3 (1989), n° 4 (1989), n° 5 (1990), n° 6 (1992), Éditions Ganésha

Cahier René Daumal n°7 (1994), n° 8 (1996), Éditions Éoliennes

Études sur René Daumal et Le Grand Jeu

1967 : La Voie de René Daumal du Grand Jeu au Mont Analogue, revue Hermès n°5, 1967-1968. Textes de Gilbert-Lecomte, Daumal, P. Minet, J. Masui, M. Random, J. Biès, J. Richer, etc.

1970 : Michel RANDOM, Le Grand Jeu, Éditions Denoël, 2 volumes, 264 et 215 pp. Tome 1 – Essai, biographie, biblio., Cahier de photographies. Tome 2 – Textes essentiels et documents présentés par l’auteur, glossaire.

1972 : Revue Europe n° 782-783/juin-juillet 1994, Le Grand Jeu.

1981 : Jean-Michel AGASSE, René Daumal, ou Le retour à soi : Textes inédits de René Daumal. Études sur son œuvre, L’Originel, Paris.

1981 : Michel RANDOM, Les Puissances du dedans, Paris, Denoël, Essai sur Luc DietrichLANZA DEL VASTO, René DAUMAL et Georges GURDJIEFF.

1992 : Kathleen FERRICK ROSENBLATT, René Daumal au-delà de l’horizon, Éditions José Corti.

1993 : René Daumal (Les Dossiers H), L’Âge d’homme.

1994 : René Daumal et ses abords immédiats, dossier établi par Pascal SIGODA, Aiglemont, Éditions Mont Analogue.

1998 : Jean-Philippe de TONNAC, René Daumal l’archange, Éditions Grasset et Fasquelle, Paris.

2003 : Caroline FOURGEAUD-LAVILLE, René Daumal : l’Inde en jeu, Éditions du Cygne, Paris.

2003 : Michel RANDOM, Le Grand Jeu, Les enfants de Rimbaud le Voyant, Le Grand Souffle Éditions, Nouvelle édition augmentée, 340 p.

2004 : Roger MARCAURELLE, René Daumal. Vers l’éveil définitif, Éditions L’Harmattan, Paris.

1977 : Revue Le Grand Jeu, collection complète, Éditions Jean-Michel PLACE.

 

Adaptation et jeu : Christian TAPONARD

Scénographie et accessoires : Pierre MÉLÉ

Lumière et régie : William FAGES

Mise en jeu : Alain BERT

CONDITIONS TECHNIQUES

Plateau minimum :

5 m d’ouverture, 6 ou 7 m de profondeur.

De plus grands plateaux sont toutefois les bienvenus. Inversement, le spectacle peut être adapté à des espaces de grande proximité.

Le décor, fait d’un système de panneaux, est en effet adaptable.

Lumière plateau :

Une fiche technique est envoyée séparément. Elle correspond à un plateau de 10 m d’ouverture sur 8 m de profondeur.

Sur un plateau plus petit la demande en nombre de projecteurs sera bien entendue moins importante.

L’équipe artistique et technique du spectacle pourra par ailleurs disposer éventuellement de son propre matériel d’un système autonome et autoporteur au cas où il n’y aurait pas de possibilité d‘accrochage dans le lieu qui nous accueille.

Présence d’un régisseur prévu par l’organisateur, pour l’aide au montage.

Matériel son :

Platine son avec lecteur de C. D.

CONDITIONS FINANCIÈRES

Coût plateau 1 400,00 € (mille quatre cent euros) T.T.C., transport matériel et équipe compris ++ hébergement et repas pris en charge par l’organisateur si nécessaire.

Le prix de cession est adaptable en fonction des moyens de la structure organisatrice.

grand-jeu-a-bord-de-l-impossible2

Mention Légales
Copyright Groupe Décembre